La Libération

1. Les préparatifs

Le 15 août, à l'annonce du débarquement de Provence, le gros des troupes allemandes et des miliciens évacuent l'Ariège. Les garnisons de Foix, de Saint-Girons ainsi que les postes de montagne se maintiennent afin de s'opposer aux offensives des résistants.
Les unités combattantes F.F.I se composent alors de plus de mille cinq cents personnes auxquelles s'ajoutent les centaines de membres des Milices Patriotiques. Les résistants d'Ariège sont dirigés par C. Souyris "Aubert" coordinateur F.F.I, le commandant M. Frechou "Cadero" et A. Calvetti "Torrent" représentants des F.T.P des 3101, 3102 et 3103ème compagnies, A. Lacoste "Abel" responsable du Front National, A. Rous "Richard" du Service des Atterrissages et des Parachutages ainsi que par la direction de la 3ème brigade des Guérilleros.
Les maquisards se sont armés aux dépens de l'ennemi, en recueillant des armes chez les paysans ou grâce à des parachutages. Une vingtaine eut lieu en Ariège sur les terrains Pamplemousse à Rieucros et Iguane à Saverdun principalement, mais aussi dans le Couserans et près de Foix. Dans la nuit du 7 au 8 août, sur le terrain Pamplemousse à Rieucros, des containers d'armes lourdes, de munitions, de matériel radio et une équipe de six agents en provenance d'Afrique du Nord sont parachutés. Parmi eux, le commandant Bigeard "Aube", Délégué Militaire Départemental, est chargé de coordonner en Ariège l'action des F.F.I. et des troupes alliées. Les officiers anglais Probert et Goffin, le lieutenant-radio canadien Deller, le sous-lieutenant radio Grangeaud et Canovas un espagnol de Pamiers.

 

2. Les batailles de Foix et de Prayols

Lavelanet et Pamiers sont les premières cités ariégeoises libérées, sans aucun combat puisque les Allemands les avaient évacuées les 17 et 18 août. La libération de Foix, siège de la Kommandantur, est fixée au 19 août par les Francs-Tireurs Partisans Français et les Guérilleros réunis à Pamiers.
Les effectifs des forces allemandes de la garnison fuxéenne se composent d'environ deux cent cinquante hommes très bien armés. Le 1er bataillon des guérilleros du commandant Abascal, composé de cent cinq hommes, progresse rapidement après la prise de la gare et du vieux pont permettant l'accès au centre ville. Les commandants J. A. Alonso "Robert", P. Giméno "Royo", J. Estevez "Montero", Bigeard, Probert et leurs unités quittent le maquis de Calzan et passent à l'attaque en fin d'après-midi.
Un train en provenance d'Ax-les-Thermes est neutralisé par les F.T.P. de la 3101ème compagnie: une vingtaine de soldats allemands se rend alors que les quatre-vingts hommes du 2ème bataillon espagnol, commandés par A. Guttièrez, arrivent en renfort de Montségur.
La bataille de rues se poursuit tandis que les Allemands se replient dans le lycée où est établi leur quartier général. Surpris d’apprendre la présence d’officiers britanniques, parmi les attaquants, le commandant allemand accepte de déposer les armes. Le bilan de la journée s'établit à environ deux cents prisonniers allemands dont vingt-sept officiers. Une douzaine de collaborateurs est arrêtée. Trois Guérilleros et deux civils sont tués.
Le lendemain, une colonne allemande d'environ trois cents soldats, regroupant les troupes de surveillance de la frontière, arrive de Tarascon et menace de reprendre la ville. Le 3ème détachement de la 3101ème compagnie F.T.P. du capitaine J. Sannac "Ferrand" et le 1er bataillon de guérilléros, conduit par P. Abascal "Madrilès" s'embusquent au sud de Prayols. Vers 10 heures, des éclaireurs allemands pris au piège annoncent l'arrivée de dix-huit camions. Le guet-apens reprend. Apercevant la carcasse de leur camion le convoi fait halte, les maquisards tirent. Les combats durent jusqu'en milieu d'après- midi. Cent vingt soldats se rendent, il y a plus d'une vingtaine de morts. Un Guérillero est tué.
Pendant ces heurts une centaine d’Allemands se sont réfugiés sur les versants du Soudour. Encerclés par les groupes armés de Tarascon, Mercus, du groupe «Camille» du maquis de Goulier et par une section de Nord-Africains menée par le caporal A. Raho, les Allemands se rendent. Les jours suivants, près de soixante autres se font prendre en montagne alors qu'ils tentaient de rejoindre l'Espagne. Arignac fut le dernier point d'appui de la Wehrmacht dans la vallée de l'Ariège. Au soir du 20 août, Foix et la vallée de l’Ariège sont libérées.

 

3. Saint Girons

Le 20 août au matin les maquisards de la Crouzette entrent dans la ville. L'Espagnol R. Rubio, chargé de la direction des opérations, est sérieusement blessé. Les nids de résistance sont neutralisés et les Allemands se retranchent vers le collège. R. Plaisant s’écroule alors qu'il essayait d'obtenir leur reddition. Le commandant Dreyer, responsable de l'Abwehr, est abattu. Alors que l'étau se resserre autour du collège, une colonne allemande motorisée d'environ deux mille hommes et cent dix camions arrive par la route de Saint-Lizier. Des hommes du 1er bataillon de la légion du Turkestan sont présents dans cette colonne aux ordres du commandant Schopplein. Il s'agit d'une unité supplétive de la Wehrmacht, composée de soldats soviétiques faits prisonniers sur le front de l'Est et enrôlés de force dans l'armée allemande. Appelés à tort Mongols, ils sont pour la plupart originaires de la Volga.
Les maquisards sont contraints de se replier. Les occupants pillent les maisons et terrorisent les habitants avant de prendre la direction de Rimont, considéré par les services secrets allemands comme un des centres de la résistance ariégeoise. A la fin de la journée, Saint-Girons retrouve sa liberté mais dix civils et cinq maquisards ont été tués.

 

4. Le martyre de Rimont

La légion du Turkestan est renforcée par les gardiens de la société pétrolière de Boussens, des fonctionnaires de l'organisation Todt, la garnison et les collaborateurs de Saint-Girons. La colonne met la matinée pour effectuer douze kilomètres: plusieurs camions tombent mystérieusement en panne. Schopplein ordonne de fusiller tout homme de plus de 14 ans.
Un civil est abattu peu avant Rimont. Contenus jusqu'à 11 heures par une trentaine de résistants très mal armés, les Allemands prennent en otage les habitants qui n'ont pu fuir ; dix sont massacrés. Les autres sont regroupés dans l'abbaye de Combelongue ou au bas du village. Ils sont libérés dans la soirée après des heures de simulacre d'exécution. N'écoutant pas ses subordonnés lui conseillant de profiter de l'effet de surprise pour foncer sur Foix, Schopplein perd un temps précieux à incendier systématiquement tous les bâtiments de Rimont.Le convoi allemand, qui tente de rejoindre les éléments parvenus non loin de Castelnau, est mitraillé par les maquisards postés sur les hauteurs enserrant la route. Des guérilleros, une unité dirigée par le lieutenant canadien Deller, des hommes du Mas-d'Azil, renforcent les unités déjà en place. En représailles, des hameaux et des fermes sont incendiés. Les Allemands se dégagent de cet étau en fin de journée mais leur avancée est freinée par des lancers de grenade. Après avoir subi de lourdes pertes, ils atteignent Castelnau : la route est jonchée de cadavres, de véhicules et d'armes.
Deux cent trente six bâtiments de Rimont et des hameaux environnants sont détruits. Onze civils et quatre résistants ont été tués. Au soir du 21 août, la colonne, au potentiel encore énorme, a été contenue mais l'échec est amer : elle n'a effectué que six kilomètres en vingt quatre heures. La résistance opposée par les maquisards est devenue sérieuse. De plus, quatre-vingt dix hommes de la 5ème brigade des guérilléros espagnols. de l'Aude rallient les combattants.

 

5. Les affrontements décisifs de Castelnau-Durban

Au petit jour, les Allemands tentent de contourner les résistants afin de pousser jusqu'à La Bastide, mais le verrou mis en place tient bon. Un groupe de résistants surpris au nord perd deux hommes. En fin de matinée l'attaque en force a lieu ; deux civils sont mitraillés. Au sud de Durban, trois combattants sont tués et un quatrième est gravement touché. Des Francs-Tireurs se déploient afin d'empêcher la progression ennemie. Les blessés de ce détachement sont sauvés par l'arrivée de guérilleros et des maquisards de Cazères.
Un résistant fait prisonnier raconte aux S.S. qu'ils sont encerclés par des milliers d'hommes ainsi que par des Anglais et des Américains. En début de soirée, le commandement nazi, berné, capitule à Ségalas.

Mille cinq cent quarante deux soldats se rendent, les autres sont capturés aux abords de Castelnau. Des gestapistes sont interceptés à Riverenert. Quelques Allemands réussirent à fuir en Espagne.
Dix maquisards et deux civils périrent. Les prisonniers allemands sont écroués au camp du Vernet. Schopplein est abattu lors d'une tentative d'évasion. Au soir du 22, Rimont n'est plus qu’un monceau de cendres mais le cauchemar est terminé.
Les affrontements du 21 et 22 août 1944 marquent la Libération de l'Ariège.